Les professionnels RH débattent de la compétitivité durable de l’entreprise – LE MATIN 22 May 2016

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Le lien étroit entre l’humain et la compétitivité durable renvoie au rôle crucial de la DRH qui doit faire en sorte d’adapter son approche de gestion à cette réalité en déployant des pratiques RH qui s’inscrivent dans une démarche de développement durable.agef

À Marrakech, pas moins de 450 acteurs socio-économiques et institutionnels représentant 25 pays ont répondu présents à la 21e édition du Colloque international de l’AGEF qui a choisi cette année de surfer sur la vague de la COP 22 en se penchant sur la thématique de la «Fonction RH et les défis de la compétitivité durable de l’entreprise marocaine».

C’est une affluence record que celle enregistrée au 21e Colloque international de l’Association des gestionnaires et formateurs des ressources humaines (AGEF) ! Un colloque placé sous le signe de la diversité et de l’ouverture, comme l’a souligné le président de l’AGEF, Abdellah Chenguiti, dans son allocution d’ouverture. «Une diversité des genres, des cultures et des origines et une ouverture sur l’ensemble des partenaires, qu’ils soient chefs d’entreprises, hauts fonctionnaires de l’État, représentants gouvernementaux, leaders syndicaux ou enseignants-chercheurs», a-t-il expliqué. Et d’ajouter que la compétitivité durable de l’entreprise ne peut être assurée sans l’implication des ressources humaines étant «la seule composante apte à faire la différence dans la construction d’un Maroc compétitif». Ce lien étroit entre l’humain et la compétitivité durable renvoie au rôle crucial, voire stratégique, de la DRH qui doit faire en sorte d’adapter son approche de gestion à cette réalité en déployant des pratiques RH qui s’inscrivent dans une démarche de développement durable. Les intervenants à l’évènement ont été unanimes à dire que la performance durable de l’entreprise passe, d’abord, par le développement durable de ses ressources humaines qui, grâce au travail de la DRH, l’aideront à atteindre ses objectifs économiques, sociaux et environnementaux.

Pour mieux appréhender ce nouveau rôle assigné à la DRH, il fallait d’abord jeter la lumière sur cette notion de compétitivité durable. Celle-ci se traduit par le «passage d’une compétitivité simple à une autre inscrite dans le temps», a affirmé Abdellatif Komat, doyen de la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales Aïn Chock de Casablanca. Celui-ci a expliqué comment la notion de compétitivité a évolué face à un cycle de vie des produits de plus en plus court et à un consommateur mieux informé et plus exigent sur la qualité. Ainsi, l’avantage compétitif que représentaient auparavant la technologie, les moyens de production, l’accès aux matières premières et au financement devenus accessibles réside désormais dans la rareté des ressources, la difficulté de l’imiter ou de la substituer ainsi que dans sa valeur ajoutée immatérielle. Trois caractéristiques que seule l’entité ressources humaines peut regrouper et qui en font la principale source davantage concurrentielle durable. Mais pour Jean-Marie Peretti, professeur à l’ESSEC et à l’Université de Corse, si compétitivité durable ne rime pas avec rentabilité immédiate, elle n’est pas non plus un simple passage du court au long terme. «La notion de durabilité est plus large et engage la prise en compte de toutes les dimensions de la performance», a-t-il précisé.

Et d’ajouter que «la compétitivité durable repose sur la capacité d’adopter des comportements innovateurs à tous les niveaux, de la conception à l’exécution». Cette notion de compétitivité par l’innovation, nous apprend Jean-Marie Peretti, repose sur le développement de comportements innovateurs et de l’aptitude au changement chez chaque collaborateur. Il s’agit également de faire en sorte que chaque salarié ait suffisamment confiance en l’entreprise pour adopter des comportements créateurs de valeur et innovateurs. Et c’est là où intervient le rôle des DRH qui doivent agir pour que «chaque salarié mobilise sa capacité à innover et ait envie de collaborer au développement de l’organisation». Ainsi, le DRH a aujourd’hui tendance à devenir DRH DD : directeur de richesses humaines et de développement durable.

«Et c’est bien dans la prise en compte de la dimension DD que l’on peut arriver à cette compétitivité durable qui repose sur l’innovation dans tous les domaines», a conclu Jean-Marie Peretti. Cette convergence entre GRH et développement durable a également été évoquée par Jacques Igalens, professeur à l’IAE de Toulouse, qui trouve que l’une des priorités qui s’imposent aujourd’hui au niveau de la fonction est «de mettre de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans la GRH et vice versa». Il s’agit de mettre en place des processus de GRH avec une dimension de développement durable tel que le recrutement de personnes compatibles avec la stratégie RSE de l’entreprise, ou bien l’évaluation qui tient compte de l’orientation RSE du collaborateur évalué. En somme, il s’agit de changer de style de management pour adopter un management responsable. Dans le sens inverse, il faudrait aussi mettre davantage de GRH dans les process RSE, qui sont en règle générale assez éloignés de la GRH, de façon à impliquer les ressources humaines dans l’atteinte des objectifs fixés.

Placer la compétitivité durable en tête des priorités de l’entreprise est indispensable, car il en va de sa survie. Et en tant qu’acteur clé dans ce processus, le DRH doit d’abord assimiler les enjeux de la compétitivité durable, mettre en place une stratégie sur cette base-là et ensuite créer des équipes-projet impliquant l’ensemble des fonctions de l’entreprise, comme l’a conseillé Zakaria Rbii, vice-président RH de Centrale Danone.
Par ailleurs, d’autres axes ont été abordés lors de cet évènement, notamment la compétitivité durable en relation avec le respect des droits de l’Homme et avec le système éducatif sans oublier l’aspect juridique.