Redécouvrir l’audit social

Par Jean-Marie Peretti

Risque et Audit sont étroitement liés. Lorsque les risques s’accroissent, les entreprises découvrent l’intérêt des audits pour les prévenir et en réduire les dommages. La volonté de maîtrise des risques suscite le recours à l’audit.  Lorsque les entreprises ont pris conscience de l’importance des risques dans le domaine social,  elles ont ressenti le besoin de l’audit social.

Depuis la création en 1982 par de l’IAS (Institut International de l’Audit Social), lieu d’échange et de professionnalisation des auditeurs sociaux par Raymond VATIER, les missions confiées aux auditeurs se sont accrues et diversifiées.

Dans le contexte du dernier quart du XX° siècle, la  pratique de l’audit social privilégiait les relations entre l’entreprise et ses salariés. L’audit social concerne des missions d’audit de la gestion sociale et d’audit des ressources humaines. Les missions se développent dans les divers domaines de la GRH en fonction de la perception des risques du moment. L’importance croissante de la législation du travail en France, renforcée en 1982 avec les lois et ordonnances Auroux qui renouvellent une part importante du code du travail, favorise le développement d’un audit social centré sur la conformité juridique. La production règlementaire et les évolutions jurisprudentielles accroissent les risques et l’importance des référentiels juridiques. Les missions d’audit intègrent souvent des référentiels de droit du travail

Le renouvellement progressif des politiques et pratiques RH  entraîne de nouvelles missions. L’individualisation croissante des décisions RH, notamment en matière de rétribution,  et à l’implication croissante de la hiérarchie dans les processus RH sont sources de risque. Les entreprises s’interrogent sur les résultats de leurs politiques RH et sur  la réalité de leur mise en œuvre sur le terrain. Elles demandent à l’auditeur social de réaliser des audits d’efficacité et d’efficience. Les missions d’audit de l’aménagement des temps de travail, d’audit des emplois, d’audit des rémunérations sont nombreuses. Le développement des missions  d’audit de la culture d’entreprise, d’audit du climat social, d’audit de la communication interne ou d’audit de la reconnaissance reflètent la perception par les organisations des risques de dégradation du lien entre l’entreprise et ses salariés. Plus récemment, l’accélération des transformations et des changements entraîne la multiplication des audits des risques psychosociaux. Et d’audits de la conduite du changement. L’apparition régulière de nouveaux risques dans un champ du social en extension explique  cette variété des missions d’audit. Les auditeurs sociaux doivent en permanence concevoir des outils et des référentiels appropriés pour l’identification et la maîtrise de nouveaux risques.

Lorsque les parties prenantes accentuent leur pression pour que les organisations assument une responsabilité sociétale plus large, le champ de l’audit social s’étend. Les missions confiées aux auditeurs sociaux concernent aujourd’hui toutes les dimensions de la responsabilité sociétale (sociale, sociétale et environnementale). Dans un contexte de mutation où croissent les exigences de toutes les parties prenantes, les attentes à l’égard de l’audit social et de RSE sont fortes. Les missions dans les divers domaines de la responsabilité sociétale et environnementale se développent. Les auditeurs sociaux élaborent et mettent en œuvre de nouveaux outils.

Le développement de labels et de normes fournit aux auditeurs sociaux de nouveaux référentiels. En 2010, la norme ISO 26 000 apporte un référentiel approprié en présentant des lignes directrices pour tout type d’organisation cherchant à assumer la responsabilité des impacts de ses décisions et activités et en rendre compte. La norme ISO 26000 apporte un cadre de référence pour la RS. Cette normalisation en matière de RSE implique des progrès en matière d’indicateurs sociaux et environnementaux et le développement d’outils d’audit appropriés.

Les missions d’audit de la responsabilité sociétale portent sur :

  • La Responsabilité Sociale notamment dans trois domaines: celui de la GPEC (qualité des emplois offerts en termes de statut et de qualification ; développement des compétences et de l’employabilité des salariés) ; celui des conditions et de l’organisation du travail (qualité de la vie au travail et management de la santé, de la sécurité et du bien être au travail) ; celui enfin de la rémunération (équitable) et du partage (responsable) des profits.
  • La Responsabilité Environnementale et la mise en place des pratiques favorisant les comportements environnementaux vertueux à chaque niveau de l’organisation: Les audits peuvent concerner les leviers  formation (modules spécifiques ou intégration de la dimension « responsabilité environnementale » dans les programmes existants de formation des managers et des dirigeants), communication (campagnes de sensibilisation aux éco-gestes et comportements vertueux), évaluation (les comportements responsables des salariés en matière environnementale sont-ils pris en compte), la rémunération (choix des critères de détermination des rémunérations variables individuelles ou collectives), négociation collective  (accords portant spécifiquement sur la responsabilité environnementale de l’entreprise ou accords plus large intégrant explicitement la dimension environnementale).
  • La  responsabilité sociétale au travers de deux leviers : la mobilisation des salariés sur des causes sociétales ; l’ancrage de l’entreprise dans les Territoires.

L’auditeur social apparaît désormais comme un acteur majeur dans le cadre de la conception et de la mise en œuvre des politiques de Responsabilité Sociétale dans les organisations. Les attentes des  organisations, confrontées à l’émergence de problèmes nouveaux, à l’égard de l’audit du social et de la responsabilité sociétale, pratique devenu incontournable pour les organisations  dans les différents pays, quel que soit leur niveau de développement, se situent dans une perspective de développement durable et de conciliation des performances économique et sociétale. Les attentes se font plus précises. Plus exigeants.les clients souhaitent pouvoir,  au-delà de leur identification, réduire efficacement les risques.

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