On sait que dans le cadre du « devoir de vigilance » rendu obligatoire par la loi de mars 2017, les entreprises établies en France qui emploient au moins 5 000 salariés en France ou 10 000 dans le monde sont tenues sont tenues de surveiller leurs filiales ainsi que leurs sous-traitants et fournisseurs concernant certains risques sociaux, environnementaux et de gouvernance. Le respect des droits humains est au centre de cette loi et l’entreprise se situant dans le champ d’application de cette loi doit publier un « plan de vigilance ».

Pour l’auditeur social cette loi en introduisant le concept de « vigilance raisonnable » donnait à la France l’équivalent de ce qui est déjà une pratique courante chez les anglo-saxons, les « due diligences », très souvent utilisées dans le cadre des acquisitions ou des gros investissements.


Mais pour importante qu’elle soit, cette notion de vigilance n’est pas entièrement nouvelle en France. Le devoir de vigilance était déjà une obligation légale imposé tant par le Code de la sécurité sociale que par le Code du travail au donneur d’ordre dans le cadre de la répression du travail dissimulé.   Lorsque un donneur d’ordre fait appel à un prestataire pour sous-traiter une partie de l’exécution d’un ouvrage, il a une responsabilité envers les travailleurs. Il doit s’assurer que tous les travailleurs sont dans une situation légale, qu’ils ont bien été déclarés et que les cotisations sociales correspondantes sont payées. A défaut, il risque des sanctions pour avoir recours indirectement au travail dissimulé. L’auditeur social était donc déjà sensibilisé à cette notion de vigilance dans le cadre du travail dissimulé et récemment cette notion a été rendue encore plus importante dans le cadre des rapports entre les sociétés de la nouvelle économie et leurs collaborateurs.

UBER qualifiait de « travailleurs indépendants » les chauffeurs qu’elle utilisait mais, en France, la Cour de Cassation vient de trancher en considérant que ce caractère de « travail indépendant » était fictif et qu’en réalité il convenait de requalifier en contrat de travail la relation contractuelle entre le chauffeur et la société UBER. Comme il existe près de 200 plateformes en France qui emploient 300 000 personnes on imagine que potentiellement cette décision peut avoir des conséquences très importantes. Dans le cas d’espèce la Cour a démontré qu’il existait un lien de subordination entre le chauffeur et Uber ce qui suffit à établir le lien salarial.

De façon générale, le fait de ne pas reconnaitre le statut de salarié à une personne que l’on fait travailler soit directement (le cas d’UBER) ou indirectement (dans le cas de la sous-traitance) est l’une des formes les plus courantes du travail dissimulé et le travail dissimulé est lui-même une des formes du travail illégal.

Il existe d’ autres formes de travail illégal qui sont définies par L.8211-1 du Code du travail, le marchandage, le prêt illicite de main d’œuvre, l’emploi d’étranger sans titre de travail, les cumuls irréguliers d’emploi et la fraude aux revenus de remplacement, mais c’est bien le travail dissimulé qui entraîne le plus de dommages à la fois pour les personnes concernées et pour les organismes qui gèrent les droits sociaux en encaissant les cotisations et en distribuant les prestations sociales.

 

Un rapport récent émanant du Conseil National de l’Information Statistique et consacré au travail dissimulé évalue à   2 % des assiettes totales les assiettes dissimulées correspondant aux entreprises ayant une existence légale (on passe sous silence les entreprises fictives…). Ce chiffre est loin d’être négligeable vue l’importance des sommes en jeu.